Le projet de « Maison des langues et des cultures d’Aubervilliers» est le fruit d’un engagement municipal, pris en décembre 2016, suite à une large concertation avec la population intitulée « Les rencontres citoyennes d’Aubervilliers »
Elle a pour vocation de rendre visible la richesse de la diversité linguistique d’Aubervilliers et des compétences linguistiques de ses habitants, et de valoriser la connaissance des traditions culturelles qui y sont attachées.
Lieu ressource pour l’apprentissage des langues tout au long de la vie, elle offre un espace d’interaction et d’échanges d’informations pour les acteurs de la formation linguistique et leur public.
Elle se positionne également comme un partenaire pour la recherche pédagogique en tout ce qui concerne les pratiques linguistiques et culturelles à Aubervilliers. A ce titre, elle peut expérimenter des techniques, des outils et des supports innovants.
La Maison des langues et des cultures d’Aubervilliers accompagne les services municipaux (état civil, services sociaux, police etc.) pour leur permettre de mieux accueillir les usagers ne maîtrisant pas la langue française.
Enfin, elle a pour ambition de tisser des liens forts avec son environnement scientifique et universitaire, et notamment avec le campus Condorcet, sur les questions de multilinguisme et d’interculturalité, en construisant des projets associant habitants, réseau associatif local et enseignants-chercheurs.
Pour cette fête de rentrée, nous avions commandé le beau temps et il fut là. Dès le matin. Les agents de la mairie sont venus installer les barnums et les premiers visiteurs ont commencé à arriver… Nous avions prévu de commencer la journée par la présentation de nos différents ateliers. D’abord il y eut les ateliers théâtre et le chant kabyle puis la reliure, les mots étrangers dans la langue française et l’atelier image. Sans oublier une présentation des jeux du monde. Le public est arrivé, petit à petit, puis de plus en plus nombreux. Chacun a pu découvrir un aperçu de la palette d’activités existant à la MLCA : diversité des langues, apprentissage du français « en faisant », etc.
L’heure du repas a été, là encore, le moment de se plonger dans les univers culturels différents. Les associations multiculturelles d’Aubervilliers sont entrées dans la danse avec entrain pour composer un buffet froid. Une farandole de pastels, nems, sandwichs et petits fours salés ou sucrés, des variations de salades grecques, vietnamiennes, maliennes, espagnoles et bien d’autres, salées mais aussi sucrées pour finir, le tout accompagné de jus de fruits de toutes sortes, voire même d’un peu de vin… Bref, de quoi se régaler dans toutes les langues.
L’après-midi musical a emballé les habitants. La chorale d’Auberbabel dirigée par Albin, a ouvert le concert avec son énergie coutumière. Ce fut après le tour de Mama, notre chanteuse malienne qui, accompagnée de son percussionniste génial, nous a régalés de ses mélodies et de ses danses endiablées. Le groupe de musique cubaine qui leur a succédé a électrisé l’assistance avec ses salsa et autres merengue. Le dames kabyles de l’assistance ont prêté aux danseuses leur foulards pour donner aux coups de reins cubains une petite couleur berbère. Le gwoka guadeloupéen du groupe d’Axelle s’est déchaîné pour finir la journée. Les badauds, entraînés par les chanteurs du groupe dansaient et chantaient à tue-tête. Et le percussionniste malien s’est joint à eux pour faire le bœuf ! Une exclusivité antillo-malienne, une belle image du multiculturalisme à Aubervilliers ! Des automobilistes, arabes, se sont même garés pour se joindre aux danseurs. Bref, les visiteurs furent nombreux et la fête fut belle. Il faudra recommencer…
AU PROGRAMME
10 h – 12 h – Présentation des activités : atelier-théâtre, atelier de conversation, chants kabyles, les mots venus d’ailleurs, etc…
12 h – 13 h 30 – Buffet interculturel avec les associations Maida pour tous, De l’autre côté et ACCSD
13 h 30 – 17 h – Concert multiculturel – Auberbabel (chants en zoulou, espagnol, portugais et arabe) – Musique du Mali avec Mama KONATE CAPRON – Musique cubaine avec des musiciens de La Havane – Musique de la Guadeloupe, gwoka
Les langues, atout ou obstacle d’une Europe en mutation ?
Jeudi 16 mai de 14h00 à 18h00
Organisée par le Pen Club Français
2019 est l’année des élections européennes mais aussi « l’année internationale des langues autochtones » par l’UNESCO. S’interroger sur les liens que tissent les langues européennes avec la modernité et plus précisément avec l’oralité, le droit, avec l’État et l’identité nationale nous parait donc très important. L’Union européenne peut-elle s’incarner dans « une langue de service » (Heinz Wismann) ? Doit-elle lier son sort à ce que véhicule cette langue de service ? Peut-elle, au contraire, pour se retrouver, s’appuyer sur les langues nationales et régionales, signe de la diversité et de la densité historique du continent ? Est-ce que les peuples, s’ils ne sont pas niés, s’ils restent inscrits dans leur histoire propre, ne seront pas disposés à mieux s’ouvrir à la construction d’un destin commun ? Dans ce cas, il reste à explorer comment les langues peuvent mieux s’ouvrir les unes aux autres, et comment faire de ce qui paraît diviser un facteur de meilleure connaissance réciproque.
Avec la participation d‘Emmanuel PIERRAT, Président Pen Club français, Sylvestre CLANCIER, président honoraire Pen club français, Fulvio CACCIA, Président du Comité diversité linguistique, Pen Club, Joan LLUIS LLUIS, romancier, Andréas BECKER, romancier, Shumana SINHA, romancière, Lakis PROGUIDIS, essayiste, Marie ROUANET, écrivaine occitane, Carlos SEMEDO, coordinateur Maison des langues et des cultures d’Aubervilliers, Paul DE SINETY, délégué général, DGLFLF, Maria GRAZIA NEGRO, écrivaine, spécialiste des littératures postcoloniales, etc.
Libraire éphémère en partenariat avec la librairie Fontaine Villiers.
Ouverture des portes à 13h30 et dernier accès à 14h00.
L’Union Européenne et les langues : mythes et réalités.
Conférence-débat par Thierry Saladin.
20 Juin | 18h30
À la manière d’un consultant, l’intervenant décrit cette Union Européenne (UE) du point de vue des langues et de la communication internationale. L’UE comporte encore à ce jour 28 États et 24 langues officielles.
Il en profite pour tordre le cou aux nombreuses idées reçues qui circulent sur la question, de manière sourcée bien sûr, et propose à l’assistance de réfléchir aux deux ou trois scénarios raisonnables, lors du débat qui s’ensuivra.
Enfin, il parle de la situation de guerre que notre langue vit chaque jour, sur le sol même où elle est née, et ce notamment du fait de beaucoup trop d’auxiliaires dans notre pays.
Le lundi 13 mai 2019, la Maison des Langues et des Cultures d’Aubervilliers a accueilli les poètes Véronique KANOR et Tyler PENNOCK.
Ils se sont rencontrés lors d’une résidence d’écriture et poursuivent ensemble une tournée franco-canadienne organisée par Red Rising Magazine, le Centre for Creative Writing & Oral Culture de l’Université du Manitoba, l’Alliance Française du Manitoba, la Maison Gabrielle Roy, la Maison de la Poésie de Nantes et les services culturels de l’Ambassade de France au Canada.
Tous deux nourrissent leurs œuvres d’une expérience de la domination et de la dépossession dont ils déclinent chacun un récit poétique ancré dans des géographies et des histoires différentes. This “Wound”, cette blessure, comme l’a nommée Tyler résonne fortement avec ‘la Blesse’ qui désigne en créole martiniquais le traumatisme intergénérationnel de l’aliénation résultant de la traite des Noirs et à l’esclavage. Ce traumatisme est aussi celui de la domination, la dépossession et des tentatives de destruction des cultures autochtones par les gouvernements canadiens, au Québec comme au Canada Britannique.
Cette blessure s’exprime dans la relation à la langue dans laquelle ils sont nés – pour Tyler, la langue cree, pour Véronique, le créole martiniquais – et dans la relation à ce qui est désigné en anglais comme le ‘first language’, la langue première, celle qui prime parce qu’elle est la langue de la domination politique, économique et culturelle. Cette langue première le plus souvent enferme l’autre langue, la ‘maternelle’ dans le domaine de l’intime, quand elle n’est pas purement et simplement étouffée.
Cette oppression, Véronique et Tyler lui donnent corps et voix par leur écriture. La langue, nous rappellent-ils, c’est un corps, un imaginaire, une relation au monde, attachés à une façon de vivre un territoire qui devient alors son pays. Empêcher quelqu’un de parler sa/ses langues, c’est l’amputer d’une partie essentielle de ce qu’il est, c’est le déraciner.
Tyler a évoqué l’entreprise d’acculturation à laquelle le gouvernement canadien a soumis les communautés autochtones et les métis, descendants de ces voyageurs qui en commerçant avec les tribus autochtones, en apprenant les langues Algonquin, en se mariant ‘à la façon de’ – selon leur coutume – avec des femmes autochtones, avaient contribué à la création d’un mode d’échange plus juste, comme l’a exprimé Véronique.
Il nous a raconté comment les enfants étaient enlevés à leur famille pour leur inculquer dans la violence la langue et la religion du gouvernement dans des écoles résidentielles dont la dernière a été fermée en 1996. Il a également évoqué l’appareil légal et judiciaire restreignant la pratique du don qui structure le fonctionnement des communautés autochtones. Le peuple Cree n’a cependant jamais cessé de parler sa langue. Mais de nombreux Crees ont été dépossédés de cette langue. En 2015, la nation Cree comptait 317 000 membres dont seulement 95 000 parlent la langue Cree.
Véronique apporte à cette résidence son point de vue de poète de l’Outre-Mer. Née en France, elle nous a dit qu’elle porte en elle l’exil et les rêves de ses parents martiniquais. Elle a vécu dans son corps et son esprit le racisme qui découle de l’esclavage, un racisme inscrit dans la langue créole, puisqu’étant celle de sa fratrie qui avait la peau la plus claire, on lui disait qu’elle a la ‘peau sauvée’, une peau échappée du noir, nous a-t-elle dit, dans sa langue poétique.
Véronique comme Tyler écrivent et publient dans leurs langues premières, le français pour Véronique, l’anglais pour Tyler. Une langue qui est la leur autant que la langue de leurs parents parce qu’elle accueille leur passage à la parole et à l’écriture et la transmission de l’expérience de cette blessure qui ne cesse de les appeler à transmettre à qui les écoutent, les cris de ceux que l’on a voulu rendre muets.
Ce qui rend “maternelle” cette langue qui leur est première, c’est la capacité qu’elle montre à accueillir l’autre langue, celle de la famille, de l’histoire ancestrale, de l’intime, du corps physique et émotionnel, à lui ouvrir l’espace pour prendre place. À Aubervilliers, la Maison des Langues et des Cultures offre l’espace physique, émotionnel et psychique à l’existence de prendre toute sa place entre les langues.
Amélie Mourgue d’Algue, 20 mai 2019
Véronique Kanor, poétesse originaire de Martinique vivant entre la Martinique et la Guyane, est notamment l’auteure du recueil Combien de solitudes… publié chez Présence Africaine Éditions en 2013, lauréate du Prix Éthiophile 2018. Spécialiste de pict-dub-poetry (performance scénique accompagnée de vidéos et de textes), elle est également réalisatrice de documentaires et de courts-métrages, et écrit pour le théâtre.
Tyler Pennock, poète Cree et Métis dont la famille vient de Lesser Slave Lake en Alberta, vit à Toronto. Titulaire d’une licence en études autochtones et d’un master en creative writing, il écrit dans de nombreux magazines, et s’apprête à publier son premier recueil de poésie, Bones, chez Brick Books Publishing au printemps 2020. Source : Présence Africaine Éditions
N’hésitez pas si vous l’aviez manqué la première fois
Partez à la découverte de chants traditionnels kabyles le 25 mai
Samedi 25 Mai | 14h
Sissi Imaziten vous invite au voyage dans la région des Bibans en kabylie pour y découvrir des chants intemporels qui évoquent un monde ancien encore vivant en nous; des chants de femmes venus du fond des âges témoins d’une civilisation profondément animiste où le profane et le sacré se rejoignent.
Des chants qui parlent de nous et qui nous donnent envie de parler de nous aux autres. Savoir d’où l’on vient pour aller vers l’autre.
Alors venez écouter, chanter, dialoguer et partager.
Fêtes, culture populaire, langue et identité – les associations de volontaires catalanes. A partir de l’exemple de Sant Pol de Mar.
JEUDI 23 MAI | 18h30
Animé par Michel Leiberich et Joan Caballero
La Catalogne, qui se comprend comme une nation sans État, essaye de préserver – depuis la perte de ses institutions historiques en 1714 – sa culture, sa langue et ses structures sociales traditionnelles. Une des expressions de cette tendance est l’organisation de petites structures locales, portées par des volontaires, qui font vivre une culture populaire, spécifiquement catalane et en langue catalane. Cette culture populaire est radicalement différente d’une culture espagnole comme elle peut être projetée à partir des institutions de l’Etat et elle peut surprendre le touriste ou le voyageur non prévenu qui se retrouve subitement dans un univers qui ne correspond pas à l’image stéréotype d’une Espagne idéalisée.
L’exposé est basé sur l’expérience personnelle des conférenciers. Ils ont répondu aux questions du public concernant l’histoire catalane et de la situation actuelle.
Michel Leiberich est maître de conférences de l’Université de Perpignan à la retraite.
Joan Caballero est employé de la mairie de Sant Pol de Mar et collaborateur de nombreuses entités de volontaires de la ville.